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Visionnaire de l'invisible
La littérature

Prêtre sur des chemins inconnus
Robert Chave
(Lethielleux - 2012)

 

Vivre la mission de l’Église avec audace

 

Le Père Chave du diocèse d’Avignon nous livre le récit de sa vie dans  une biographie très vivante parue chez Lethielleux. Toute sa vie, il est resté fidèle à une intuition riche de sens : on exerce son ministère de prêtre en ne reniant pas ses origines ouvrières. Pour lui, fils de cheminot, il a mis la priorité aux contacts d’amitiés avec tous, spécialement ceux qui sont pauvres et ceux dont l’Eglise est loin. Quand on reste ainsi fidèle à cette intuition missionnaire, celui qui est ordonné prêtre non seulement ne renie pas la façon dont sa vie de famille l’a façonné mais, quelque soit la mission que le diocèse ou l’ordre religieux lui confie, n’est jamais ‘parachuté’.

              Cette biographie est très actuelle car elle éclaire bien des problèmes que l’Eglise affronte aujourd’hui. Prenons simplement comme exemple cité dans ce livre le reproche que beaucoup font à l’Eglise de ‘hier’: celle de l’époque où l’Eglise a privilégié l’enfouissement en mettant sous le boisseau son identité. Les prêtres ouvriers ont vécu profondément cet enfouissement dans le monde du travail et cela à leurs risques. Et pourtant, on n’a jamais autant parlé d’eux dans le monde à tel point que le Vatican a voulu mettre fin à cette expérience. Certains ont confondu enfouissement et service humble des plus pauvres. Il faut lire les pages 77 à 93. Le Père Chave raconte sa vie avec des membres de des mouvements d’Action Catholique. Mission d’enfouissement ? Pour lui, ce fut une histoire mouvementée et pleine d’évolutions qui a été jusqu’à faire renaître la maison diocésaine : « Elle  témoigne de la vitalité de cette seconde moitié du 20ème siècle, en même temps que d’une recherche et d’une créativité incessante, signes sans doute, d’une époque en pleine transformation. » (p.112).

Mai 68 fut un temps riche de remise en cause et de créativité :  « Riche en innovations,  l’époque fut rude aussi quant aux remises en questions. C’était un temps de bouleversements sociaux, économiques, de choses idéologiques avec une nouvelle génération de jeunes. » Le P. Chave ajoutera plus loin que ce fut aussi une époque où un certain nombre de prêtres souffrant du fossé entre le monde et l’Eglise ont remis en cause la façon dont la hiérarchie concevait le rôle du prêtre dans ce monde en plein bouleversement. Et l’auteur termine ce chapitre sur mai 68 par ces mots : « On ne peut oublier quarante après, que nous vivons aujourd’hui une nouvelle période de rupture entre l’Eglise et la société et qu’elle appelle à créer des réponses nouvelles. » (p.134) Ce fut pour un certain nombre de chrétiens dont le P. Chave, un temps qui demandait des réponses audacieuses car comme l’a proclamé le P. Marty, archevêque de Paris, « Dieu n’est pas conservateur. Dieu est pour la justice. »

Autre période combien féconde : sa présence au Festival de théâtre d’Avignon. Ordonné prêtre en 1947, un des amis prêtre l’invite cette même année à visiter une exposition de peintures contemporaines. Dans la brochure de l’exposition, il lit les propos de Fernand Léger : « Nous vivons une époque dangereuse et magnifique dans laquelle s’enlacent désespérément la fin d’un monde et la naissance d’une autre… Mais derrière cette figure anxieuse et tourmentée, quelques fleurs timidement sortent de cet amas complexe d’éléments décadents et de primitive réalisation… » (p.150) Ces propos décrivent la démarche constante du Père Chave dans l’histoire du festival et ce depuis la naissance du Festival. Il a toujours cherché dans les dizaines de créations théâtrales les fleurs qui naissent. Ces fleurs ont pu s’épanouir grâce aux spectateurs et aussi aux liens d’amitié qu’a su nouer le Père Chave et à l’espace qu’il a créé pour que les auteurs, les acteurs ou les metteurs en scène puissent prendre la parole et expliquer leur audace artistique qui souvent posait question. Comme le souligne le Père : « Comme la bonne société avignonnaise, l’Eglise d’Avignon n’était guère préparée à rencontrer ce monde : une certaine morale faisait écran. La rencontre faisait apparaître des mentalités criantes de différences. De plus, le Festival étant laïque, un certain nombre de chrétiens s’en défiaient. » (p.151)

Le Père Chave a été aussi un passionné du monde de la communication. Grâce à des pionniers comme lui, l’Eglise est présente à ce moyen de communication. Mais aujourd’hui, un défi doit être relevé : comment par l’image (différente d’une œuvre artistique) transmettre une présence des chrétiens au monde qui se veut être un service humble vécu souvent avec des personnes d’autres cultures et de religions ? Comment transmettre le vrai visage de Dieu qui s’est manifesté par Jésus en croix, par l’annonce de sa résurrection et le don de l’Esprit qui est souvent présence discrète à tous les hommes ? Comment faire parler les quelques fleurs qui timidement sortent de cet amas complexe qu’est le monde d’aujourd’hui ?

La façon de vivre la mission de l’Eglise par le Père Chave est non seulement toujours plus qu’actuelle mais demande toujours autant d’esprit audacieux et créatif grâce aux amitiés nouées avec ceux croisés sur la route.

 

Septembre 2012, R. P.

 

 

 

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