Visionnaire de l'invisible
La littérature
Cézanne abstraction faite
Denis Coutagne
(Cerf - 2011)
Contempler l’invisible
Denis Coutagne, historien de l’art et philosophe, aborde dans ‘Cézanne, abstraction faite’, une question passionnante : à l’ère de l’abstraction, quelle a été l’influence de Cézanne avec ses peintures figuratives de la nature et des hommes ? Pour aborder cette question, ce spécialiste de Cézanne retient le thème de l’Annonciation. La peinture de Fra Angelico est tout autant une peinture relevant de la figuration que de l’abstraction. Le peintre de Florence a en effet réussi dans sa peintre rendre visible ce qui est invisible : l’accueil de Dieu en Marie. « Cette femme qui reçoit Dieu comme personne ne l’a reçu dans l’Ancien Testament devient la plus charnelle des femmes parce que ce Dieu qu’elle entend rejoindre dans la spiritualité se fait chair en elle. » (p. 16) La peinture de Fra Angelico rend visible ce qui appartient à l’invisibilité.
En des chapitres abondamment illustrés, l’auteur présente les œuvres de David, d’Ingres, Géricault, Courbet, Monnet, Van Gogh, Gauguin, Cézanne, Kandinsky, Mondrian, Malevitch, Picasso, Matisse et Rouault… ces artistes qui, grâce à leur génie, ont su rendre visible l’invisible.
Pour l’auteur, Cézanne par sa création artistique est le maître du 20ème siècle qui exprime le plus profondément l’invisible au cœur du visible. L’exemple de la montagne Sainte Victoire peinte plusieurs fois par Cézanne n’est pas une simple photographie de cette montage mais une figure de l’ascension et de la résurrection non par au sens religieux mais dévoilant le mystère de l’homme qui a besoin de la nature pour devenir ‘plus humain’. « Allez au Louvre. Mais après avoir vu de grands maîtres qui y reposent, il faut se hâter d’en sortir et vivifier en nous, au contact de la nature, les instincts, les sensations d’art qui résident en nous…» écrit Cézanne à Camoin. (p.170)
Ce livre d’art passionnera tous les amateurs d’art qui aiment se laisser interroger par des artistes qui ont le génie d’exprimer ce qui échappe souvent au premier regard.
Février 2012, RP
