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Visionnaire de l'invisible
La littérature

Homo economicus
Daniel Cohen
(Albin Michel - 2012)

 

Comment soigner les blessures des temps modernes ?

 

 

         Dans "Homo economicus, prophète (égaré) des temps nouveaux", Daniel Cohen, économiste, définit le monde moderne par l’idée que le bonheur sur terre est devenu le but de l’humanité. Pour atteindre ce but, l’économie est sommée de prendre en charge la direction du monde. Cette évolution demande que notre génération repense le rapport entre le bonheur individuel tant recherché aujourd’hui et la marche des sociétés. «  L’homme moderne aspire à l’autonomie, à la liberté de réaliser un destin digne de ses attentes. » (p 28) Mais il se butte à la compétition avec les autres et à la société qui a ses impératifs pour rendre possible un vivre ensemble. Heureusement que la nature humaine à une incroyable capacité d’adaptation. Mais il sera demandé aux hommes et femmes d’aujourd’hui beaucoup de lucidité et d’énergie car aujourd’hui la richesse se suffit à elle-même au détriment de la culture.

Comment soigner les blessures des temps modernes ? Le divorce a donné naissance à de nombreuses familles monoparentales qui incarnent la figure de l’abandon… !a perte d’emploi qui signifie au chômeur qu’il est devenu inutile à la société… le capitalisme financier qui s’est affranchi des règles de l’économie sociale du marché : « Lorsque le monde de l’entreprise brise ‘la valeur travail’, il doit organiser un mode plus inégal pour fonctionner efficacement. » (p 54)

Les réseaux sociaux façonnent l’espace public en réveillant l’esprit civique à l’échelle planétaire. Facebook permet des discussions aux multiples visages mais en même temps le monde numérique risque de mettre à mal l’intimité, modifiant la relation du ‘moi’ aux autres et beaucoup font l’expérience que le temps passé sur Internet est souvent un temps de solitude. « La société numérique émergente fait donc apparaître une nouvelle figure de l’individu : celle d’un être qui semble privé d’une  conscience claire de lui-même, à la fois en extériorité, sous le regard constant des autres, et réalisant aussi, sous des masques multiples, la part inassouvie de ses fantasmes. » (p 162) La société numérique et la révolution génétique risquent d’emporter notre société loin de leurs bases traditionnelles.

Notre monde occidental a été façonné entre autres par le christianisme. La crise de l’empire romain, « devait-elle se conclure par une formidable révolution religieuse, une nouvelle conception de la personne, aux sources de l’individualisme tel qu’on le connaît aujourd’hui, celle d’un être qui cherche dans le moi intérieur la vérité de sa personne… Une révolution spirituelle de la même ampleur est-elle concevable aujourd’hui, provoquée par le retour de nouvelles tensions sociales, de la difficulté de rendre intelligibles les mouvements du monde ? » p 77)  

Les dernière lignes du livre de Daniel Cohen sont un appel à la créativité : «  En son temps, le christianisme avait offert une solution à la crise de l’Empire romain, permettant d’arracher l’homme antique aux complexités d’une société devenue inintelligible. A notre tour de repenser l’idée que nous nous faisons d’un monde en harmonie avec lui-même, qui nous fasse sentir aussi ‘l’avant-goût du bonheur et de la paix’… (p 207)

 

 

Mars 2013, R.P.

 

 

 

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