Visionnaire de l'invisible
La littérature
Le Cœur converti
Stefan Hertmans
(Gallimard - 2018)
Toute intégration appelle à s’enrichir mutuellement
Lorsque Stefan Hertmans apprend que Monieux, un petit village provençal où il a élu domicile, a été le théâtre d’un pogrom il y a mille ans et qu’un trésor y serait caché, il part à la recherche d’indices. Une lettre de recommandation découverte dans une synagogue du Caire le met sur la trace d’une jeune noble normande. La belle Vigdis est tombée amoureuse de David, étudiant à la yeshiva de Rouen. Au péril de sa vie, elle fuit avec lui dans le Sud au péril de leur vie. Son père ayant promis une forte somme à qui la ramènerait, des chevaliers se lancent à sa poursuite. Puis les croisés, de plus en plus nombreux sur le chemin de Jérusalem, sèment mort et destruction dans leur sillage.
Vigdis, s’étant convertie, a tout fait pour être profondément intégrée à la communauté juive de son mari, à ses traditions, à élever ses enfants comme une maman juive sait le faire avec son charisme particulier. Mais Vigdis n’a jamais pu faire taire une petite musique mystérieuse qui chantait au plus profond d’elle-même.
Ce roman est passionnant car il plonge le lecteur et la lectrice dans le Moyen âge. Cette aventure de Vigdis fait aussi réfléchir, nous qui sommes interrogés par l’accueil des migrants et leur intégration dans nos communautés. Toute intégration appelle à s’enrichir mutuellement. Aider des migrants à s’intégrer sans accepter le mystère que chacun porte en lui, est sans doute généreux mais est loin d’être suffisant pour vivre ensemble humainement. La fin de ce roman en est une dramatique illustration.
Novembre 2018 - R. Pousseur