Les Bouleversements culturels
Texte de référence
La Femme dans la société d'aujourd'hui 3 - L’étonnante évolution de la vie de famille
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Le mois dernier, dans notre article sur l’évolution de la place de la femme dans le société, nous avions noté que : « Dans l’expérience de la grossesse, la rencontre de l’autre est vécue dans l’intimité la plus charnelle qui soit. L’intégrité physique et la liberté de la mère sont engagées, et même altérées par cet être encore inconnu. Une nouvelle responsabilité naît envers l’être vulnérable et démuni qu’est l’embryon humain, et il appelle à s’effacer pour lui donner la vie. »
Dans cet article, nous n’avons pas cherché à faire un exposé mais à noter simplement quelques évolutions sur lesquels chacun d’entre nous peut mettre un prénom d’une personne avec qui nous sommes en lien et en dialogue.
Aujourd’hui, nous assistons à des bouleversements profonds car lors de la grossesse, le foetus n’est pas forcément dans la mère qui va élever l’enfant. Pour les parents, ‘s’effacer pour donner la vie’ sera une aventure bien différente si on vit seul avec son enfant, si on est deux de sexe différent ou de même sexe, aventure différente si l’enfant est une fille ou un garçon, si l’enfant est unique, si il a des frères et soeurs ou naît dans une famille recomposée. N’oublions pas que dans cette aventure entre en ligne de compte les familles des parents.
L’évolution de la mère dépend aussi de la culture qui façonne la vie en société. La culture occidentale est non seulement marquée par l’individualisme mais nous vivons dans une époque où il devient de plus en plus difficile d’aimer. Dans Plonger, un roman de Christophe Ono-dit-Biot, paru chez Gallimard en 2013, décrit notre monde actuel en racontant le jour où Zap annonce à son conjoint qu’elle est enceinte alors « qu’ils vivent tellement sans amour. » confie Zap à son compagnon qui se met à réfléchir sur leur vie à deux : « Il me semble que de plus en plus le filon de l’amour s’épuisait. En ces temps de crise, il aurait pourtant dû être considéré comme une valeur refuge. Mais on lui tournait le dos parce que cela prenait du temps et ne rapportait rien ? Dans la sphère privée, je ne voyais que des gens qui se séparaient. Dans la sphère professionnelle, on s’entre-déchirait. Tout le monde avait peur. Les incertitudes financières, les climats perturbés… les migrations de millions de pauvres hères… n’arrangeait rien à l’affaire. Fraterniser c’était se fragiliser… » (p 207)
A la suite de Julia Kristeva, psychiatre, nous pouvons ajouter que nous sommes actuellement façonnés par la seule civilisation qui n’a plus de discours sur la maternité.
D’un autre côté, beaucoup d’observateurs notent que l’évolution de notre société manque d’humanité à cause d’un manque d’intériorité. Nos contemporains souffrent d’un manque de moments d’arrêt. Il suffit d’observer ce qui se vit dans les transports en commun : le nombre de personnes qui ont le téléphone à l’oreille, les yeux devant leur écran. Avec la TV tout le temps allumée, les images et le bruit tuent la réflexion. Ils finissent par uniformiser toute réflexion personnelle. Les huit jours pour réfléchir à la décision d’avorter ou non viennent d’être supprimés par le Parlement français au nom de l’égalité et de l’épanouissement de la femme.
Dr Mancheron : Quel terrible phrase que”Le filon de l’amour s’épuisait “ ....Combien de fois ais-je entendu cette phrase”Nous ne nous aimons plus ...nous allons nous quitter “..... Manque d’humanité par manque d’intériorité oui mais nous sommes sollicités à vivre dans l’instant, dans l’émotivité ...sans prendre de recul ...ni de temps de silence .Il y a quelques semaines, après une chaude partie de tennis de table,je proposai à l’un de mes petits fils 10 minutes de Silence dans mon bureau “Sans musique ? Sans ordinateur ?”...IL a expérimenté et trouve cela “pas mal “ ... Je ne peux que cautionner vos propos sur les nouvelles dispositions sur l’I.V.G .....J’avis eu une journée de formation sur l’Ecoute avant… et après l’I.V.G et sous forme de boutade le psychiatre qui animait nous avait conseillé : “Jamais d’I.V.G …en T.G.V.”.....Vous abordez la définition et le statut de l’Embryon...cela se complique quand on voit apparaître des articles sur le commerce des produits I.V.G ....
Autre évolution : Les conditions de la procréation ont beaucoup évolué et posent la question de la maternité. Qui est la mère : Celle qui donne les ovocytes ? Est-ce celle qui porte le fœtus pendant 9 mois ? Est-ce celle qui élève l’enfant ? Les conditions de la procréation ont posé une autre question car la science ne pourra jamais trancher la question de savoir si quelques cellules commençant à se multiplier sont déjà un être humain. Pour les juifs, l’embryon est une personne à partir du quarantième jour. Pour les catholiques, dés la fécondation d’une ovule, la personne existe. Pour les musulmans, la vie est d’origine divine mais l’adhérence à la matrice de la femme est progressive. Dans une perspective laïque, tout est envisageable. Certains pensent que sont parents ceux et celles qui aiment l’enfant et l’accompagne et non celle qui le met au monde.
A la maternité, le fait de donner son nouveau-né, chair de sa chair, au père de l’enfant, est un acte fondateur : la mère reconnaît qu’elle n’est pas seule à donner la vie, que le nouveau né n’est pas seulement la chair de sa chair. Au nom de la recherche du bonheur, la culture occidentale à tendance à effacer de l’horizon le côté tragique de la vie humaine. Or enfanter à un côté tragique. Quand dans la vie humaine, il n’y a pas ce côté tragique, l’homme ne devient pas pleinement homme. Les grecs ont eu cette intuition et l’ont traduite dans leurs tragédies. La procréation maintient la différence sexuelle, une différence qui fait apparaître comme une richesse qui est créative.
L’homme aussi voit son identité évoluer. L’homme accède à la paternité en même temps que sa conjointe accède à la maternité mais chacun à sa manière. Le rôle de chacun est moins figé. Avant, seule la parole de la femme confirmait à l’homme sa paternité. Aujourd’hui, l’ADN peut révéler qui est le père. Aujourd’hui, l’homme est plus participant à la naissance de l’enfant. Il assiste à la naissance, il est invité à couper le cordon ombilical et reçoit le bébé des mains de la mère. L’homme est appelé à communier à ce que vit sa conjointe, à prendre le temps du dialogue, trouver les mots, les gestes de tendresse qui apaisent… L’homme ne peut plus dominer la femme mais est appelé à sortir de son individualisme… Aujourd’hui, le devenir de l’embryon congelé devenir dépend autant de l’homme que de la femme.
Dr. Mancheron : L’évolution sur le statut du père est juste ans le journal de la Croix de ce week-end il y a un long reportage sur une maternité à Paris ...ou l’on signale que les pères sont en salle de naissance… mais aussi en salle d’opération quand il y a naissance par césarienne..... .Chez les jeunes pères il y a de plus en plus d’écoute, de dialogue et de tendresse avec leurs enfants ...et leurs compagnes.
Bien que toutes ces évolutions ne sont pas terminées et continuent à poser de sérieuses questions, la femme n’est plus esclave de son corps ni de son conjoint. Elle a acquis plus de liberté, de responsabilité et une nouvelle reconnaissance dans la société.
Quant à l’homme, il est appelé à renoncer à sa nature qu’il croit supérieur à celle de la femme et à vivre la différence, source d’écoute, de dialogue, de créativité commune.
Devant les personnes qui se débattent dans ces problèmes, le Pape François nous appelle à avoir une attitude de compassion. Qu’est-ce à dire ? D’abord être lucide sur l’image de l’Eglise qui est dirigée par des hommes. C’est peut-être pour cela que notre Eglise privilégie le dogme et la loi plus que l’écoute, le dialogue et une créativité participative.
Dr. Mancheron : .L’Eglise est-elle dirigée par des hommes ? Probablement. Au dernier Colloque organisé par l’Office Social de ma ville, nous avons eu trois intervenants très intéressants sur le sujet de” l’Adaptabilité de la société au vieillissement de la population “...Trois Hommes.... et un auditeur de dire avec humour :”Quand on fait des Colloques sur le sujet ,ce sont toujours des hommes qui parlent...Quand je fais des animations en institutions ...Je ne vois que des femmes ...” La il y a du boulot.... et la Présidente de l’Union internationale des supérieures générales Soeur Carmen Sammut nous confie dans la Croix du lundi 26 octobre “Le Synodes gagnerait à entendre la voix des femmes ( 3 religieuses seulement… ) Je pense que le synode gagnerait vraiment à entendre la voix des femmes, expertes en plusieurs domaines, très proches de la vie, de ceux et celles qui souffrent, aux marges de la société… Je suis heureuse que le texte final parle de la nécessité de défendre et promouvoir la dignité de la femme ,de la discrimination et de la violence dont elle est souvent l’objet...”
En fait, il s’agit pour tous les membres de l’Eglise, hommes, femmes, enfants, d’être simplement des disciples de Jésus ensemble, avec des richesses différentes mais complémentaires pour qu’elles soient créatives.
Être serviteurs de l’humanité à la manière de Jésus. Pour l’illustrer, on pourrait citer plus d’un extrait des évangiles. Un seul passage de l’évangile de Marc (12, 28-34) suffira.
A un scribe qui demandait à Jésus quel le premier des commandements, Jésus lui répondit que ce commandement est d’aimer Dieu de tout son cœur et aimer son prochain comme toi-même. Le scribe reprit que Jésus avait raison et qu’aimer ainsi vaut mieux que toutes les offrandes et tous les sacrifices. Jésus ayant remarqué que le scribe avait fait une remarque judicieuse, lui dit : « Tu n’es pas loin du Royaume de Dieu. »
Il est à noter que Jésus accueille ce scribe qui s’était avancé vers lui pour l’interroger et Jésus entra en dialogue avec lui. A la fin de ce dialogue, Jésus lui dit qu’il n’est pas loin de la vérité mais n’ajoute rien. La parole de Jésus n’est pas celle d’un juge ni d’un professeur mais elle est lumineuse. Jésus ne lui dit pas que faire pour entrer dans la maison de Dieu. Il lui dit simplement qu’il n’est est pas loin ? Pour son avenir, il lui fait confiance. Marc ne dit pas ce qu’est devenu ce scribe.
Dr. Mancheron : J’ai bien aimé les propos du Cardinal Oscar Maradiaga qui nous dit:”Après ce synode, l’Eglise sera plus Samaritaine..”. Vaste sujet… mais beau programme !
Novembre 2015 - Dr. Philippe Mancheron et Robert Pousseur