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Visionnaire de l'invisible
Le Cinéma

 

HOMELAND
Irak année zéro
Réalisateur : Abbas Fahdel
Sortie : 10 février 2016

 

Affiche du film  "Homeland"

       En 2002, alors qu’une nouvelle guerre est sur le point d’éclater en Irak, le réalisateur Abbas Fahdel, qui vit depuis 15 ans en France où il a construit sa vie et sa carrière, se sent le devoir de revenir dans son pays natal afin de capter des images de la vie quotidienne des habitants. Hébergé par des membres de sa famille, qui vivent toujours au pays, le réalisateur décide de filmer leur vie, mais aussi l’Irak, qui garde les stigmates du conflit des années 90. La figure de Saddam Hussein, jamais évoquée, est cependant omniprésente, que ce soit à travers les portraits du raïs, affichés partout, ou par le biais de clips à sa gloire, diffusés en permanence à la télévision.

Ce film est une fresque puissante qui nous plonge pendant deux ans dans le quotidien d’une famille, peu avant la chute de Saddam Hussein, puis au lendemain de l’invasion américaine de 2003.

Ce documentaire est découpé en deux parties, l’avant et l’après.

Partie 1 : Avant la chute

La première partie décrit la vie d’une famille qui se prépare à la guerre. Elle va être terrible, mais il y a quand même l’espoir de voir une démocratie s’installer après la chute de la dictature. Que peut-il leur arriver de pire ?

Partie 2 : Après la bataille

La seconde partie, après la chute du régime, est davantage tournée en extérieur. Les langues se délient et on découvre un peuple anéanti, un pays mis à feu et à sang où, dans les rues, les incidents éclatent, les bandes rivales s’affrontent.

Au cours des deux parties, nous partageons les joies et les craintes de cette famille irakienne, qui nous montre à quel point toutes les familles du monde ont les mêmes aspirations : travailler, éduquer les enfants, rire, aimer, s’impliquer et construire une société nouvelle…

Donner un visage vivant à l’Irak, voilà l’objectif que s’est fixé Abbas Fahdel en filmant ses proches à Bagdad entre 2002 et 2003, avant et après l’invasion américaine. Le film (plus de cinq heures trente) dévoile un pays complexe, intime, surprenant, loin des clichés véhiculés par les journaux télévisés ou la propagande locale. Peu porté sur le spectaculaire, notamment dans la première partie consacrée à l’imminence de la guerre (où l’on se pose des questions comme : Si les États-Unis attaquent demain, à quoi bon réviser mon examen ?), ce documentaire fleuve dégage pourtant une puissance tragique folle. Elle émane de son regard attentif, plein d’intelligence et d’empathie ; en particulier pour son neveu Haidar (12 ans), dont il a fait le personnage principal de son film.

Abbas Fahdel nous montre également qu’au cœur de la guerre il existe des hommes, des femmes et des enfants exceptionnels, des héros du quotidien, « des gens qui sont nos frères humains et que l’on quitte le cœur brisé quand le film prend brutalement fin ».Abbas Fahdel revient donc au pays. Il y  filme ses proches pendant près d’un an, de février 2002 à mars 2003. Avant le début des attaques américaines, il observe le quotidien d’une famille ordinaire sous la dictature de Saddam Hussein. Un quotidien où les jeunes adultes s’apprêtent à connaître leur deuxième guerre. Si Fahdel commence son film en nous invitant à la table de sa famille, c’est bien sûr une façon de renouer avec ceux qu’il a quittés si longtemps, et d’inviter le spectateur à se sentir chez eux comme chez lui. Mais c’est aussi parce que, sous Saddam Hussein, il est dangereux de filmer autre chose que les conversations banales d’une famille unie. L’attente de la guerre donne au temps un air de perpétuelle hésitation. On se prépare à la guerre comme on l’avait fait vingt ans plus tôt, en creusant un puits dans le jardin ou en protégeant les fenêtres en prévision du choc des bombardements. En regardant dans un souk des statues d’artisans du passé fixés dans la répétition de leur activité, la sœur du cinéaste remarque que c’est sans doute à cela que reviendra sa famille : repasser les vêtements avec un fer chauffé au charbon, quand le conflit éclatera. La guerre ne se contente pas de faire bégayer l’histoire dans des situations identiques. Elle fige le temps, arrête l’évolution du pays pour le ramener à l’époque ancienne du tout-artisanal, transformant les hommes en paysans, quel que soit leur parcours personnel. Après la guerre les portes de la maison familiale s’ouvrent pour nous emmener sur les routes, dans les quartiers, nous rendre compte des ravages causés et de l’absurdité de la présence militaire américaine. L’impression que, dans une époque comme dans l’autre, le temps s’est arrêté, est sans doute renforcée par l’écart de dix ans qui sépare le tournage et le montage du film, essentiellement dû à l’événement traumatique de la seconde guerre qui a empêché Fahdel de regarder ses rushes pendant toute une décennie. Le dernier plan s’arrête sur la mort de son neveu Haidar, âgé de douze ans, atteint d’une balle perdue.

C’est Haidar, l’enfant qui grandit avec le film, qui nous guide dans les ruines de son pays en emboîtant le pas du cinéaste jusqu’à devenir son relais à l’écran, livrant ses réflexions percutantes sur l’état du pays ou discutant avec ses habitants. Devant la violence de villes détruites et le contrôle ennemi, on est sans cesse surpris par la vie qui résiste, comme ces quelques naissances survenues dans la famille. La difficulté à rentrer chez soi quand toutes les routes sont plus ou moins arbitrairement barrées par l’occupant n’empêche pas les étudiants de retourner à l’université ou les hommes d’aller travailler.

Une très belle scène montre un frère du réalisateur qui visite avec tristesse son ancien studio de cinéma, détruit par les bombardements. Cette scène agit comme un rappel à l’intérieur du film, des conditions de dénuement extrêmes dans lesquelles s’effectue le tournage. Du coup, Homeland, dans sa seconde partie, est presque exclusivement un film qui court les rues à la rencontre de leurs habitants. Cet artiste, qui comprend « qu’on se venge d’un régime, mais pas de la culture », met le doigt sur ce que Homeland a de si précieux : il invente les images réelles d’un peuple écrasé mais vivant, opposées à celles de la propagande de Saddam Hussein, omniprésent sur les écrans de télévision, comme à celles de la télévision occidentale qui rabâche le discours d’une guerre propre, invisible, et sans morts, alors que L’Irak n’est plus administrée et que des bandes de pillards  envahissent la ville et tuent sans sommation.

Abbas Fahdel ne joue ni avec les siens qu’il respecte, ni avec les spectateurs qui apprennent très tôt que son neveu ne s’en sortira pas. Mais quand il disparaît soudain, alors cette guerre lointaine devient la nôtre car nous avons appris à aimer cet enfant et ceux au milieu desquels il grandit. Homeland : Irak année zéro  nous laisser alors le sentiment tragique qu’un grand film de guerre est faire exploser le film d’une famille heureuse, qui attend la paix depuis si longtemps…

 

Claude D’Arcier - Avril 2016

 

 


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